Avant d’ouvrir notre boutique rue de Birague, nous avions une boutique éphémère à côté de la boutique Vert d’Absinthe qui a entre-temps fermé ses portes. La proximité avec ce magasin expert en absinthe a éveillé notre curiosité. Sans être des spécialistes, nous avons acquis une certaine connaissance concernant ce produit mythique que nous allons partager avec vous, en plusieurs épisodes.
Une plante connue des Egyptiens
La consommation d’Absinthe à des fins récréatives est relativement récente. L’Absinthe a cependant été consommée dès l’Antiquité, en vertu des ses propriétés médicinales. Chez les Egyptiens, les Romains, les Grecs, on prescrivait de l’absinthe pour ses effets aphrodisiaques, antiseptiques, apaisants.
Lucrèce (1er siècle av. J.-C) décrit même comment on rusait pour faire avaler de l’absinthe aux petits romains, pour les guérir et leur redonner des forces.
Quand les médecins veulent donner aux enfants la répugnante absinthe, ils enduisent auparavant les bords de la coupe d’une couche de miel blond et sucré: de la sorte, cet âge imprévoyant, les lèvres seules séduites par la douceur, avale en même temps l’amère infusion et, dupe mais non victime, en recouvre au contraire force et santé
http://fleche.org/lutece/progterm/lucrece/lucr012.html
Un remède préconisé au Moyen-Age
Bref, au départ, l’absinthe était un médicament dégueulasse.
Au Moyen-Age, on trouve des recettes de remède à base d’absinthe dans les ouvrages de Hildegarde de Bingen. Pour Hildegarde, qui est considérée comme la première naturaliste d’Allemagne, l’absinthe a des effets positifs sur la digestion et tout ce qui touche à l’estomac. Selon les pathologies elle conseille de boire du jus d’absinthe ou un elixir d’absinthe. Hildegarde a publiés ses recettes dans différents ouvrages. Aujourd’hui encore on trouve des produits médicinaux à base d’absinthe réalisés selon ses préceptes.
Au Moyen-Age il est aussi courant de boire du vin mélangé avec du miel et de l’absinthe. Frédégonde était l’ambitieuse épouse du roi mérovingien Chilpéric Ier qui n’hésitait jamais à zigouiller ses adversaires. On lui attribue notamment le meurtre d’un seigneur Franc venu l’accuser meurtre de l’Evêque de Rouen. Frédégonde lui a servi une grande coupe de vin d’absinthe empoisonné et le malheureux a eu tout juste le temps de prévenir ses camarades avant de s’éteindre
« Ne touchez pas à ce breuvage, sauvez-vous, malheureux, sauvez-vous, pour ne pas périr avec moi ! »
Nouvelles Lettres sur l’Histoire de France – Histoire de Praetextatus, Evêque de Nantes
Premières distilleries d’absinthe
Ce n’est qu’à la fin du XVIIIème siècle que la distillation de l’absinthe a commencé en Suisse puis de l’autre-côté de la frontière dans le Haut-Doubs français. Il y a toujours conflit pour savoir qui a inventé la recette originelle, mais tout se passe entre Pontarlier et Couvet, les deux sites étant distant d’une trentaine de kilomètres, et traversé par la frontière. La recette d’origine aurait été inventée par un Français réfugié en Suisse après la révolution.
Ce qui est sûr c’est que la première distillerie d’absinthe a été ouverte en 1798 à Couvet en Suisse par Henri-Louis Pernod et son beau-père Daniel-Henri Dubied.
Le père d’Henri-Louis Pernod, Abraham, était un bouilleur de cru local, et son beau-père, un négociant en dentelles, avait acquis la recette de la fabrication de l’absinthe.
Quelques années plus tard, en 1805, Henri-Louis Pernod monte sa propre distillerie à Pontarlier pour couvrir le marché français et aussi pour devenir autonome. Travailler avec son beau-père ce n’est pas toujours facile. Il crée ainsi la société Pernod Fils.
Pour la petite histoire Pernod et Fils fusionnera plus tard avec la Société Pernod Père et Fils, fondée à Avignon par un autre Pernod: Jules-François Pernod. C’est le fils de Jules-François, Jules-Félix qui inventa le pastis. En revanche, pas de lien de parenté entre Henri-Louis et Jules-François, mais, le groupe Pernod Ricard est aujourd’hui l’héritier de cette fusion.
Mais revenons à notre absinthe, qui se développe tout doucement dans le Haut-Doubs. Sa consommation reste tout d’abord confidentielle et locale, mais différentes distilleries voient le jour à Pontarlier, qui va devenir la capitale de l’absinthe.
La suite bientôt…